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Châtiment corporel en milieu scolaire au Bénin : un autre regard sur l’interdiction

Longtemps considéré comme l’arme ultime et infaillible pour inculquer le savoir, le châtiment corporel est formellement interdit dans les écoles, lycées et collèges du Bénin depuis des années. Malheureusement, la plupart des enseignants et éducateurs se sentent désarmés et ont du mal à maintenir la rigueur nécessaire sans faire usage de la violence. Dans cet article, j’explique les causes, le cadre juridique et les méthodes alternatives au châtiment corporel en milieu scolaire.

Quelles sont les causes du châtiment corporel en milieu scolaire ?

Les causes du châtiment corporel en milieu scolaire sont multiples. En plus des causes sociologiques et historiques qui justifient l’usage du châtiment corporel dans nos sociétés, il existe des causes spécifiques au milieu scolaire.

Les difficultés liées au maintien de la discipline par les enseignants

Plusieurs facteurs semblent justifier l’usage du châtiment corporel en milieu scolaire. La principale est la difficulté des enseignants à maintenir la discipline. Il est en effet une méthode disciplinaire qui consiste en l’exercice d’une force physique par une personne ayant une autorité sur l’apprenant.

L’objectif, c’est lui infliger une certaine douleur en vue de le punir, le contraindre à exécuter une tâche ou à le faire changer de comportement. Les formes les plus courantes sont les fessées, les coups de bâtons, de lanières ou de fouets et les postures pénibles. Ces pratiques mettent à mal la santé mentale des enfants.

L’indiscipline dans les salles de classe est aussi favorisée par plusieurs réalités. Il s’agit notamment des effectifs pléthoriques. En moyenne, il y a 60 apprenants dans les salles de classe des établissements publics au Bénin.

Le manque de motivation des apprenants

Le manque de motivation des apprenants est le second facteur qui justifie l’usage du châtiment corporel dans nos écoles. Bon nombre d’apprenants n’ont pas une motivation réelle et sincère à aller à l’école. Cette baisse de motivation peut être due à plusieurs situations. Premièrement, il peut s’agir du manque de sens. L’apprenant ne perçoit pas l’utilité de l’instruction et le vit comme une punition ou une obligation.

Deuxièmement, il peut s’agir d’une baisse des performances scolaires de l’apprenant. Lorsqu’il a du mal à assimiler certaines notions ou a de plus en plus de faibles notes, sa motivation en l’absence de suivi décroît. Enfin, la motivation de l’apprenant peut diminuer lorsqu’il n’est pas challengé. Cette situation crée l’ennui chez l’apprenant qui manque d’intérêt à aller aux cours.

D’autres facteurs peuvent également justifier le recours des enseignants au châtiment corporel. Pourtant, les textes ont été clairs. Le châtiment corporel est interdit au Bénin.

Quel est le fondement juridique de l’interdiction du châtiment corporel en milieu scolaire au Bénin ?

Le fondement juridique de l’interdiction du châtiment corporel au bénin se retrouve entre circulaires, notes de service, lois et conventions internationales. Les premiers textes béninois sur l’interdiction du châtiment corporel au bénin datent de 1962 et 1981. Il s’agit respectivement des circulaires n°100/MENC et n°1264/MENCJ. Ils ont été adoptés bien avant l’entrée en vigueur et la ratification par le Bénin de la Convention relative aux Droits des Enfants.

Ensuite, le Code de l’Enfant adopté en 2015 dispose en son article 18 (a) que l’enfant a droit au respect de son intégrité physique et morale. Le 22 novembre 2018, le Ministère de l’Enseignement Secondaire, Technique et de la Formation Professionnelle a publié une note de service portant interdiction du châtiment corporel au bénin. Deux ans plus tard, il fait un communiqué de mise en garde à l’endroit des responsables d’établissements après avoir constaté une recrudescence de l’usage du châtiment corporel.

En 2018, le Parlement béninois a adopté un nouveau Code Pénal. Ce dernier prévoit en son article 509 l’infraction des coups et des blessures volontaires qui renvoient à la méthode disciplinaire tant fustigée.

Enfin, les textes internationaux et différents comités de sauvegarde des droits des enfants se sont également prononcés sur la question. Ainsi, la CIDE, la Charte des Droits et du Bien-Être de l’Enfant, le Comité des Droits de l’Enfant de l’ONU et l’OMS se sont prononcés sur la question. Ils invitent les États partis à prendre les dispositions nécessaires pour protéger les enfants contre toutes les formes de violence physique.

Il faut constater une volonté manifeste de l’État béninois à éliminer la violence physique des établissements au regard des conséquences que nous n’avons cessé de constater. Malheureusement, même les efforts de répression sont restés sans grande conséquence avec un accroissement de l’indiscipline dans les établissements.

La discipline dans les établissements scolaires sans violence physique, est-ce possible ?

Une réponse hâtive à cette question ne peut qu’être négative. Oui, la discipline, la rigueur et l’excellence sont possibles dans nos établissements sans fessée et coups de bâtons. En effet, le gouvernement ainsi que le pouvoir législatif ont créé un cadre juridique efficace contre le châtiment. Cependant, les autorités compétentes n’ont pas mis en place des initiatives pour promouvoir l’usage des méthodes alternatives à la violence physique.

‘’On ne devrait pas se limiter à l’interdiction du châtiment corporel, mais aller plus loin. Il faut donner les moyens aux enseignants pour instaurer la discipline et l’ordre sans le châtiment corporel’’ Carine HOUNTONDJI, Enseignante de mathématiques

Interrogée sur la question, madame Carine HOUNTONDJI a expliqué les méthodes disciplinaires qu’elle met en place dans ses classes de mathématique dans les collèges au Bénin. Selon elle, le dialogue doit primer. Une méthode consiste à établir en étroite collaboration avec les apprenants, un ensemble de règles et principes à respecter. Sur son, compte twitter, elle publie régulièrement des carrousels sur la thématique.

L’interdiction du châtiment corporel est bien. Il a permis d’observer une diminution des cas de violence physique dans les établissements. Cependant, il a été constaté un désintéressement tant de la part des enseignants que des apprenants. L’État a ainsi le devoir de mettre en place des programmes de formation progressifs à l’endroit des enseignants. Cela leur permettra d’avoir des méthodes alternatives à la violence physique.

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Mariette AHYI

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